Le rocher immobile à la croisée des chemins

 Comme tout le monde quand je m'ennuie, j'ai parfois de drôles d'idées. Ainsi, tout à l'heure, je regardais mes mains aux doigts croisés posées devant moi sur la table et je me suis demandé, devant cet amas de petits membres enchevêtrés, lesquels appartenaient à quelle main. Mon cerveau n'a réussi à faire le tri que lorque j'ai finalement décroisé mes petits doigts. Et là, j'ai pensé que dans la Vallée des Auts' Mecs c'était un peu la même chose. Il est difficile de déterminer où s'arrête le monde des hommes et où commence celui des animaux, ou plutôt il est quasi impossible de démêler leurs multiples imbrications subtiles et secrètes. Ce qui est sûr c'est qu'on est dans une zone de contact qui, en période de chasse, évoque parfois le no man's land apocalyptique qui séparait les tranchées allemandes et françaises pendant la première guerre mondiale. Je me souviens d'une image d'un de mes livres d'histoire où l'on voyait  un unique peuplier déchiqueté tendu vers le ciel et sur ses branches, des étourneaux.

Mais j'en viens à mon sujet. Ici dans la VDAM, il y a un rocher (évoqué dans un message précédent) qui me fait un peu penser dans son genre au peuplier égaré. Ce petit promontoire fait partie des premiers éléments qui accrochent mon regard et que j'inspecte chaque matin par les fenêtres de la maison. Comme il se trouve à une vingtaine de minutes de marche et qu'il constitue un balcon idéal sur la vallée, je m'y suis souvent rendu avec mes jumelles ou mon appareil. Mais je ne suis pas le seul à fréquenter ce lieu contrairement à ce que je croyais au début. Ainsi, il est tour à tour :

 Le poste avancé de la race des saigneurs

  Le bastion - piédestal du grand cerf impétueux

Seigneur en son brame de la folie d'être

L'îlot de patience des vautours gris des brumes

Voilà donc l'histoire de ce rocher que le hasard a déposé à la croisée de nos chemins, où chacun peut jeter en passant un coup d'oeil au destin des autres.